Le grand salon, vue du mobilier et de l'armoire en laque

Ce cliché provient du fonds photographique en possession des descendants de domestiques du château d'Abbadia. Il a été réalisé lors de la campagne photographique conduite en 1896 à l'occasion de l'officialisation de la donation d'Antoine d'Abbadie à l'Académie des sciences. Il permet en outre de visualiser les oeuvres d'Edmond Duthoit en termes de décoration et de mobilier quelques années seulement après son intervention. 

Cette photographie présente une vue du grand salon, orientée vers le Sud-Ouest, prise depuis l'entrée du fumoir. La perspective donne à voir, malgré l'état détérioré du cliché, l'accumulation du mobilier, telle qu'elle se pratique dans les demeures bourgeoises de l'époque.

Bien que les fauteuils néogothiques soient installés sur le pourtour de la pièce ronde, de nombreux meubles d'assise sont disposés au centre, posés sur un grand tapis turc. Au premier plan, sont installés un fauteuil crapaud, la chaise dite "éthiopienne", une petite chaise mauresque et un grand pouf carré. Un autre ensemble de sièges, composés d'une chaise néogothique, du second fauteuil crapaud, d'une chaise à nourrice et d'une chaise à vierge, leur fait face comme dans un dialogue décoratif. L'arrière-plan permet d'observer, à droite, l'armoire en laque de style chinois et, à gauche, une partie de la cheminée monumentale en pierre, devant laquelle ont été placées une torchère dorée, un tapis en peau de zèbre et la table dite "éléphant" supportant un vase oriental. 

Cet ensemble constitue une authentique collection digne du goût de l'éclectisme répandu durant le règne de Napoléon III, dévoilant un mode de vie régi par l'art de recevoir et le renouveau de la recherche du Beau. L'association des influences gothiques et des citations orientales omniprésentes illustre, en outre, le savoir-faire de Duthoit et les théories de Viollet-le-Duc. 

La mise en scène photographique oriente clairement le discours vers une ambiance exotique et fantaisiste. Ce cliché, comme ceux de sa série, a permis d'estimer les impacts du temps sur la décoration et le mobilier du château et, en apportant des éléments historiques, a contribué à la restauration de l'édifice au début des années 2000.