Virginie d'Abbadie, la Dame d'Abbadia
L'esprit vif et l'âme sensible, l'un des traits de sa personnalité qui perdura sans s'altérer était sa passion pour la musique et notamment le piano. Elle était capable de jouer pendant des heures les airs de compositeurs contemporains, tels que Chopin ou Bach, ou plus anciens, comme Mozart.
Nul ne sait pour quelle raison elle se trouvait encore célibataire à l'âge de 27 ans, mais sa rencontre avec Antoine d'Abbadie s'avéra suffisamment intense pour que ce vieux garçon obtienne assez facilement son consentement au mariage. Les noces eurent lieu le 21 février 1859 à Lyon, dans les terres de la fiancée, comme le veut la tradition.
Le couple d'Abbadie pratiquait la double résidence, selon l'usage de la haute-société du XIXe siècle, partageant leurs activités mondaines et sociales à Paris et leur retraite romantique et scientifique sur la corniche basque. Hormis pour quelques rares occasions, les deux époux voyagèrent systématiquement ensemble à l'étranger. Hormis leur voyage de noce en Allemagne, ils visitèrent ensemble une grande partie de l'Europe, l'Algérie, puis en 1881 les Antilles et Haïti, et entre 1884 et 1885, l'Egypte, la Mer Rouge, l'Ethiopie et la Turquie.
Virginie d'Abbadie revêtit un rôle de premier plan dans la construction de son château, dont elle assura le suivi du chantier sur le terrain et fut responsable de nombreux choix décoratifs. Cela correspondait aux fonctions féminines dans la société du XIXe siècle, Virginie étant chargée, come toute femme de son époque, des relations sociales et de l'entretien de leur maisonnée. Elle était d'ailleurs toujours louée par ses hôtes pour son hospitalité. Mais elle n'en restait pas moins une femme d'esprit, ce qu'admirait notamment son jeune ami, l'écrivain rochefortais Pierre Loti.
Sous les auspices de Virginie, Pierre Loti séjourna souvent à Abbadia, appréciant son ambiance intemporelle et pittoresque, crapahutant sur les falaises et les sentiers de son domaine, l'inspirant pour des compositions élégiaques néo-romantiques. Il affirmait devoir à Virginie d'Abbadie son initiation du Pays basque, lui dédicaçant son ouvrage emblématique Ramuntxo en 1897.
Virginie d'Abbadie fut terrassée par le décès de son époux en 1897, mais n'en conserva pas moins sa vivacité et son énergie. Elle décéda quatre ans plus tard, en 1901, à l'âge de 73 ans, et repose à ses côtés dans la crypte située sous le choeur de leur chapelle. Sa sépulture porte une épitaphe qui reste à méditer : "Ma reconnaissance a porté ma croix".
Bibliographie
- DELPECH V., Le château d'Abbadia à Hendaye: le monument idéal d'Antoine d'Abbadie, 3 volumes, thèse de doctorat d'Histoire de l'art, Université de Pau et des Pays de l'Adour, 2012.